Cette semaine a eu lieu la fête de Pourim. Chose intéressante, cette histoire constitue dans notre tradition le dernier événement de tout le Tana’h (Bible) : nous assistons donc à la naissance de ce que sera le judaïsme d’aujourd’hui.
Nos derniers prophètes vécurent à l’époque de la Méguila et Mordehai sera le premier “Roch Yechiva”. C’est en effet lui qui va créer le premier centre d’étude et il prendra le relai des prophètes. A ce sujet la Guemara nous apprend : « ‘Ha’ham adif minavi » / « le sage est supérieur au prophète ».
Comment comprendre cette comparaison ?
Le Talmud nous éclaire à ce propos, dans la Guemara berahot p.28. Il y est expliqué que Moshé rabenou, avant sa mort, a demandé à Hachem : « Que deviendra la Torah après moi ? » Hachem le projeta alors dans l’Histoire et lui montra la génération de Rabbi Akiva. Il vit ce maître enseigner la Torah devant une foule d’élèves et assistait au cours avec un immense ravissement… Mais, il ne comprenait apparemment pas ce qui s’y disait.
A la fin du shiour, un élève pose la question « Rabbi, d’où sais-tu tout cela ? » et Rabbi Akiva de répondre : « hala’ha léMoshé miSinaï », nous l’avons appris de Moshé rabenou qui lui-même l’a appris du Sinaï… La Guemara conclut en disant : « Na’hath daato shel Moshé rabenou» / « Moshé rabenou a été rasséréné par cette remarque ».
Essayons de comprendre ce texte.
Moshé rabbénou ne fut pas subitement heureux de voir que Rabbi Akiva lui attribuait son propre enseignement. Tout simplement, Moshé assistait à une démarche de la Torah qui était celle de la compréhension et non plus celle de l’intuition. Auparavant, Hachem délivrait un message aux prophètes qui le transmettaient très fidèlement. Les sages, eux, comprennent un enseignement et l’expliquent.
Lorsque Moshé rabbénou a vu que le message qui était le sien par la prophétie était capable de transiter via l’enseignement, il fut alors rassuré. Il s’est dit que la Torah serait transmissible à toutes les générations… Et il en est effectivement désormais ainsi.
Depuis que les prophètes ne sont plus là pour nous transmettre le message divin, nous nous tournons vers les maîtres, les grands sages de la Torah, qui nous le transmettent. Toutefois, je terminerai en ajoutant ce que dit Maimonide (le Rambam) dans le deuxième livre du guide des égarés : le ‘ha’ham est doté du « roua’h hakodech », littéralement « d’un esprit saint », qui lui permet de pressentir les événements.
Il donne l’exemple suivant : “Un ‘ha’ham enseignait à ses élèves lorsque soudain il leur dit qu’il leur faut quitter la maison où ils se trouvaient. Il demande donc à tout le monde de se lever et de partir. Quelque temps après, la maison s’effondre. Le ‘ha’ham avait pressenti le danger.”
Voila comment le Rambam exprimait ce don que la Torah donne à celui qui l’utilise de toutes ses forces, ses énergies et avec sincérité : D.ieu l’éclaire sur les événements à venir. Encore aujourd’hui, lorsque nous voulons comprendre ce qui est arrivé ou peut arriver, nous nous tournons vers nos maitres qui restent notre lumière, nos guides. Comme dit le passouk : « Véayou éné’ha root èt zoré’ha » / « Tes yeux regardent tes maitres ».
Dans le brouillard dans lequel nous nous trouvons aujourd’hui, comme il est difficile d’y voir clair…
La sérénité que procure le maître de Torah à tous ceux qui l’écoutent mérite d’être rappelée, tel un enseignement qui aura traversé l’exil pour arriver jusqu’à nous.
Chabat chalom