Le traité de Roch Hachana se fait l’écho d’une discussion fameuse entre les Écoles de Beth Chamaï et de Beth Hillel à propos de la date précise du Nouvel An des arbres fruitiers. Au départ, il s’agit d’une discussion très technique puisque la Torah a précisé lors du prélèvement du Maasser (la dîme) : « Chana, Chana » : on prélèvera chaque dîme de l’année séparément. De telle sorte que l’on ne mélange pas chaque prélèvement d’une année sur l’autre.
Il était donc important de savoir à partir de quelle date on calcule la nouvelle année des arbres fruitiers.
La hala’ha est, comme d’habitude, selon Beth Hillel qui place ce Nouvel An à Tou BiChevat. Au-delà de cette discussion « technique », Tou BiChevat s’est imposé, tout au long de l’histoire juive, et notamment sous l’influence des sages de Safed au 16e siècle, comme le jour où l’on célèbre les fruits de la nature. Cette fête est devenue l’occasion de rendre hommage à D.ieu pour l’abondance, et l’immense variété de fruits qu’Il a mis à notre disposition, dans la nature, tout à fait librement. Sous l’impulsion du Ari zal, ce jour est célébré par un véritable « sé- der » au cours duquel on consomme les fruits selon un ordre bien précis, ordre qui distingue quatre sortes de fruits : ceux qui ont une écorce et un noyau non comestible, ceux qui ont seulement une écorce non comestible, ceux qui ont seu- lement un noyau non comestible et enfin ceux qui sont entièrement comestibles.
Toujours selon le Ari zal, ces quatre catégories correspondent aux quatre niveaux de la création du monde dans lesquels le Créateur est passé pour arriver jusqu’au monde matériel. Du monde de l’émanation purement spirituel, Hachem a créé, formé et organisé l’ensemble de sa Création pour que l’Homme puisse en profiter.
C’est là l’occasion, pour nous, de constater que ce qui, de prime abord, paraît fortuit est en fait l’expression d’une sagesse infinie. Et que nous devons durant cette journée là consommer le maximum d’espèces différentes.
Depuis de nombreuses années, je me suis inscrit dans cette dimension et je me suis toujours efforcé de consommer à Tou BiChevat une multitude de fruits correspondant aux quatre catégories que nous venons de citer. Et d’ailleurs, mon record en la matière est de 70 fruits, mais on peut aller au-delà ! Certains se plaignent des interdictions de consommer tel ou tel aliment pour diverses raisons comme la cacherout. Mais en fait, ils devraient se réjouir du nombre de fruits que l’on a le droit de consommer sans restriction.
En nous donnant cette occasion à Tou BiChevat, le Créateur vient nous demander : « Plutôt que dé- plorer ce que vous n’avez pas, réjouissez vous de ce que vous avez ». Et ainsi l’Homme peut, au diapason de la nature, se réjouir en consommant des fruits et en profitant de leur goût, de leur odeur et de leur couleur. L’un des plus beaux spectacles qu’il nous soit donné de voir est celui des superbes marchés de fruits qui sont une véritable symphonie de couleurs, de parfums et de goûts. Tâchons donc d’en profiter sans jamais oublier de vérifier la pureté de ce fruit (veiller à ce qu’il n’y ait pas de vers) et de réciter au préala- ble la bénédiction des fruits, ainsi qu’après leur consommation.
C’est ainsi que Tou BiChevat aura une résonnance éminemment spirituelle dont le Zohar dit que toute la bénédiction dans le Monde va dépendre de la manière dont le peuple juif célèbre cette belle fête de Tou BiChevat.
Que cette nouvelle année soit une année de bénédiction d’abondance, de joie, et de santé.