Dans la lecture de cette semaine, nous allons assister à deux moments particulièrement émouvants qui méritent chacun un enseignement :
Le premier d’entre eux, c’est Yossef qui se révèle à ses frères : ceux-ci n’arrivent pas à croire à la nouvelle. Ils sont littéralement sidérés au moment où Yossef, ne leur faisant aucun reproche, leur dit deux mots qui les remettront totalement en question : « Ani Yossef », « Je suis Yossef ».
Il ne leur a pas rappelé dans le détail ce qu’ils avaient pensé de lui, les stratagèmes conçus, la volonté de le tuer puis sa vente mais il utilisa ces deux mots, qui constituent la remise en question la plus totale.
Cette « révélation », dans notre tradition, est comparée à ce qui se passera pour chacun d’entre nous après 120 ans, en entrant dans l’autre monde : on entendra comme seul reproche « Ani Hachem », « Je suis Hachem. »
Cette prise de conscience, en entendant que c’est bien Lui qui est le maître du monde, nous remettra totalement en question. En une fraction de seconde nous réaliserons que nous n’avons pas pleinement réalisé qu’Il existait, qu’Il était là présent avec nous dans chacun de nos moments, dans notre intimité, nos doutes, nos périodes de crises, de peurs et d’espérance. Nous n’avons pas vraiment tenu compte de cette présence qui remettait tout en question.
C’est cela la véritable Téchouva : réaliser qu’Hachem est là, qu’Il existe, qu’Il est incontournable et que tout doit s’opérer dans nos vies en fonction de Sa présence.
Souvent, quand il arrive à quelqu’un des ennuis il se dit : « Voilà la raison de la maladie, de l’agression, de tel ou tel échec… » . Il faudrait se dire : « C’est Hachem qui me l’envoie ». Qui pense instantanément que ces moments traversés sont la volonté du tout puissant ?
Cette petite phrase, « Ani Yossef », est peut-être même la plus grande de la Torah. Celle qui nous fait reconsidérer complètement toute notre conception de vie, tous nos choix. Nos retours sur image de chacune des phases de notre vie doit être terrible au vue de cette phrase.
Le deuxième passage émouvant c’est lorsque Yossef retrouve son père. Le texte dit alors que Yossef embrassa son père mais pas que Yaacov l’embrassa également. Nos maîtres se demandent ce que le patriarche faisait donc à cet instant là ? Ce moment auquel il ne croyait plus, qu’il avait sans le dire espéré depuis 22 ans, se déroule maintenant… et il n’embrasse pas son fils ?
Yaacov n’est pas un être insensible, loin de là. La Torah l’a démontré à de nombreuses reprises. Voilà pourquoi nos sages diront qu’il était en train de dire le « Chema Israël » !
Réciter le Chema procède de la même idée : il s’agit de ramener directement à Hachem les plus grands moments de notre vie. Il existe des moments dans nos vies où l’on a envie de pleurer et l’on pleure. L’émotion est alors plus forte que tout…. Elle gagne tout notre être, on ne peut que l’exprimer ainsi. Yaacov nous donne une grande leçon : lorsqu’on éprouve une immense joie ou un sentiment très fort, il faut immédiatement le ramener à Hachem. C’est ce qu’a fait Yaacov en récitant le « Chéma Israël. » Il ne s’est pas étalé en profusion d’affection, en disant tout ce que son cœur contenait et qu’il souhaitait dire à son fils. Il a récité le Chema : « Je te remercie Hachem, après tout ce que j’ai pu imaginer, penser, endurer, de me faire vivre ce grand moment ».
Voilà pourquoi le Chema Israël est ce qui encadre nos vies, du premier au dernier instant. C’est cette conviction que Hachem est présent partout. Il est celui qui, non seulement dirige nos vies, mais nous fait également vibrer, espérer, vivre.
Chabat Chalom.