La paracha de Béaalotékha, que nous lirons ce chabat, possède une particularité unique dans toute la Torah. Elle contient en effet deux versets encadrés par deux « Noun » inversés, annotation présente aussi bien dans nos livres que dans le Sefer Torah.
Nos sages expliquent de manière très précise dans le traité de Chabbat (P. 116) la signification de ces deux versets. Ils nous y indiquent que ces deux versets forment une paracha à part entière. D’ailleurs, la guémara nous précise que le nombre de lettres contenues dans ces deux versets est de 85, par conséquent tout Séfer torah endommagé conserve son titre à condition qu’il renferme encore 85 lettres intactes ! Si c’est le cas, ce Séfer Torah méritera qu’on le sorte, même durant le chabbat, dans le domaine public (Rechout Harabim) en cas d’incendie ou d’autre force majeure. C’est dire si ces deux versets possèdent un statut tout à fait particulier et une importance hors norme.
Une question nous interpelle alors : pourquoi ces deux versets sont-ils posés ici ?
Nos Sages répondent que ce minuscule chapitre n’est pas à sa place mais qu’il a été inséré pour « séparer deux châtiments l’un de l’autre ». Si l’on consulte le début de notre paracha, on comprend aisément que le premier malheur auquel il est fait référence est celui causé par la faute des Plaignants (Mitonenim) qui avaient réclamé de manière odieuse de la viande à Moché Rabbénou. Ceux-ci se sont vus durement sanctionnés puisque la Torah a recensé 22 000 morts dans le peuple à la suite de cette plainte déplacée. Mais quel est le second châtiment qui est séparé du premier par nos deux fameux versets ? Il semble soigneusement dissimulé…
Lorsque l’on se penche sur les versets suivants, on y découvre une démarche capitale de la part du peuple : « Vayissou Mehar Hachem » : les enfants d’Israël ont quitté la Montagne d’Hachem… Nos Sages viennent alors nous indiquer : « C’est cela la punition ». Pourquoi donc quitter la proximité du Mont Sinaï est-il si problématique ? Il semble évident que le peuple a campé autour de cette montagne uniquement pour y recevoir la Torah et de manière tout à fait provisoire ! En quoi la quitter pour poursuivre sa marche vers la Terre d’Israël serait-il préjudiciable ?
C’est là que nos Sages nous éclairent en précisant : « Les Enfants d’Israël sont partis du Mont Sinaï comme un élève qui fuit l’école ». Nous avons tous été écoliers et nous nous souvenons tous que l’un des sons les plus agréables de notre enfance était la sonnerie indiquant la fin des cours. Ouf ! Nous étions alors enfin libres et nous quittions l’école en courant… C’est un peu dans cette optique que les Enfants d’Israël ont quitté le Sinaï. Leur châtiment c’est de n’avoir pas su apprécier le Don de la Torah à sa juste valeur. Au lieu de cela, ils ont fui à l’instant précis où ils ont pu le faire.
Cette approche est lourde de signification.
Elle nous permet d’en déduire que toute personne qui n’a pas de plaisir à accomplir les mitsvot et à se plonger dans l’étude de la Torah est amenée, irrémédiablement, à la subir. Pour lui, pratiquer la Torah est un châtiment. Alors qu’à l’inverse, celui qui la reçoit avec bonheur goûte le plaisir de chaque instant. La faute des Enfants d’Israël a été de n’avoir pas su comprendre que se trouver au bas du Mont Sinaï, si près du Tout Puissant au moment du don de la Torah, était un délice spirituel sans précédent… alors que fuir était une forme d’ingratitude de leur part.
Voilà donc l’enseignement que nous livrent ces deux versets.
Il nous reste à espérer que nous avons su tirer les leçons de cette erreur d’appréciation et que nous avons compris qu’étudier la Torah est et reste le plus beau de tous les bonheurs de la vie.
Chabat chalom !